Je boxe l’anxiété

Par Josée Durocher

On m’a déjà dit que je paniquais toujours. Premièrement, je ne panique que très rarement. Deuxièmement, je n’accepte plus de me faire lancer par la tête des « Cesse de paniquer ! » à qui mieux mieux. Je trouve la chose inacceptable, qui plus est totalement péjorative et non fondée.  Je boxe l’anxiété.

Les gens qui me jugent sur le simple fait que je suis soumise à énormément d’anxiété sont inconscients du fait qu’un jour, oui, un jour, ils pourraient très bien se retrouver à ma place. Non que je le leur souhaite, non. Mais cela fait partie de l’ordre des probabilités et moi, j’en suis consciente.

On n’a qu’à observer le monde pour se rendre compte que tout ne tourne pas rond. Le stress est la maladie du siècle et nos vies « programmées » pour la réussite « absolue » n’aident en rien la santé mentale des gens qui composent notre société.

« Je suis brûlée. » est une affirmation que mon cerveau s’épuise à me répéter intérieurement surtout lorsque je vois des femmes de mon âge tenir à bout de bras leur famille, le bien-être de leurs enfants, de leurs parents, de leur conjoint, leur boulot et toutes les tâches qui s’ajoutent à cette liste qui donnent davantage dans la démesure que dans la zénitude.

Moi, je serais incapable — je le sais trop bien — de vivre encore ce genre de vie où on doit courir pour se reposer sous peine de s’effondrer.

J’ai beau être une femme anxieuse, jamais je ne remonterais le temps, même si je le pouvais, pour revivre ne serait-ce qu’un jour de course folle à être à bout de souffle tout le temps. Moi, désormais, j’ai une vie plutôt calme et elle me convient parfaitement.

Je trouve le moyen de me taper des crises d’angoisse dignes de ce nom tout de même, alors je n’ose imaginer ma vie comme elle l’a déjà été !

Oui, bon, il m’arrive encore de courir — qui ne le fait pas du tout de nos jours —, mais je ne cours pas une course perpétuelle et les fois où tout va vite sont plutôt rares si je compare ma vie avec celle qui a déjà été mienne ou encore si je la compare à celles d’autres femmes de mon âge qui s’arrachent les cheveux chez leur psy en braillant leur vie parce qu’elle leur échappe.

J’écris tout cela, pourtant, j’ai failli tomber dans le piège plus d’une fois dernièrement. Vous savez ? Le fameux piège de la réussite, à tout prix, des grands accomplissements, à grands coups de sacrifices, et des cernes jusqu’aux genoux qui viennent avec tout ça.

Heureusement pour moi, mon corps m’a stoppée net en cessant de fonctionner comme avant et en ne « digérant » plus le stress comme il l’aurait fait à mes trente ans.

Mes angoisses et mon anxiété ont donc momentanément pris le dessus sur moi et je n’ai eu d’autre choix que d’arrêter et de réfléchir. Oui, j’ai alors tout arrêté. Et comme j’avais maintenant du temps, je me suis bien observée.

Et je l’ai vue et je l’ai regardée dans les yeux, cette fameuse peur de rater quelque chose, ou pire encore, de rater ma vie si je ne faisais pas une « wonder woman » de moi. Et plus mon regard croisait le regard de mes peurs, moins mon corps ne fonctionnait.

Il y a différentes stratégies qu’on peut adopter devant la peur. Nous pouvons attaquer (c’est cela qui m’avait menée dans cet état peu enviable), nous pouvons fuir (ce n’est pas très louable puisque cela nous prive de nous responsabiliser) et nous pouvons faire face.

Pour une fois dans ma vie, j’ai fait face. Et tout est devenu soudainement très clair pour moi. Ces peurs de ne pas être au bon endroit ou de rater ma vie cachaient une autre très grosse peur, celle de ne pas être reconnue et aimée.

Du coup, je me suis rappelé des mots d’une bonne amie très sage qui répète à qui veut l’entendre que, « Nous aimer c’est notre job à nous, pas celles des autres ! » et j’ai cherché les raisons pour lesquelles je m’aimais.

C’est fou ! Lorsque nous transformons le regard que nous portons sur nous-mêmes, nous faisons des découvertes merveilleuses qui nous étaient jusque là insoupçonnées !

Vous savez quoi ? Je m’aime ! Je m’aime pour mille raisons aussi valables les unes que les autres. Je ne peux en faire la liste exhaustive ici, mais je peux affirmer que je m’aime, même anxieuse, car je déploie des trésors de débrouillardise pour me sortir de mes crises panique.

Je m’aime parce que j’accepte d’évoluer avec les épreuves. Je m’aime aussi beaucoup parce que tout ce que j’ai fait comme choix dans le passé détermine qui je suis maintenant et vous savez quoi ? Je me trouve très bien !

Je m’aime parce que je fais de mon mieux, alignée avec mon cœur et mon esprit. Tout ce que j’entreprends maintenant est teinté des deux afin que je sois toujours une meilleure personne.

Je m’aime, c’est fou, c’est doux !

Et je m’aime sans courir, sans me presser, sans m’élancer vers tout ce qui me rend anxieuse en société. Je travaille bien, tout en conscience et je suis heureuse, voilà tout ce que j’ai « trouvé » en m’observant sincèrement.

Alors, oui, nous vivons dans un monde effréné en ne souhaitant que le meilleur. Moi, le meilleur, je l’ai trouvé et je le découvre chaque jour… c’est moi. Meilleure qu’hier et meilleure en devenir pour demain.

 

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