L’importance de se dire autiste

Par Josée Durocher

Je suis une personne autiste. Quand on me regarde, rien n’y paraît. Quand on discute avec moi, presque rien n’y paraît… et quand on me voit vaquer à mes différentes occupations, ça passe presque inaperçu. 

 

Pourquoi ?

Parce que je suis, à 54 ans, une véritable pro du masquage… de l’imitation des autres en mode haute fréquence ! Je suis consciente de mes différences et je sais les camoufler dans beaucoup de comportements qui ont l’air plus typiques que neuroatypiques.

 

Je ne suis pas la seule dans cette situation. Effectivement, beaucoup d’autres personnes autistes n’ont pas l’air autistes. Chez eux, l’autisme passe incognito et pourtant !

 

Être autiste

Pourtant, nous avons tout de même des limitations plus ou moins grandes et bien que l’air n’y soit pas, on connaît bien la chanson de l’autisme dont le rythme nous bat les tympans en permanence. On n’est pas autistes de temps en temps… on l’est tout le temps !

 

Se taire

Certaines personnes, n’étant pas à l’aise de s’afficher telles qu’elles sont, « taisent » leur autisme ou le nie carrément. Je sais de quoi je parle parce que certaines personnes autistes de ma connaissance, et certaines très proches de moi agissent de la sorte par gêne et même par honte.

 

La gêne ou l’inconfort je comprends… la honte, je vais vous surprendre, mais je comprends tout aussi bien ! Il existe tellement de préjugés concernant l’autisme dont nous, les personnes autistes, sommes victimes qu’il est véritablement tentant de camoufler jusqu’à ignorer leur condition.

 

Mais ces personnes, en agissant ainsi et à mon humble avis, ne se rendent pas du tout service. À taire leur autisme aux autres, quand un problème survient, ils ne sont pas prêts à le vivre et les autres, qui ne savent rien de l’autisme chez eux, ne savent vraiment pas comment réagir.

 

La couleur bleue

Pour moi, l’autisme est comme la couleur de mes yeux. Je suis née ainsi et même si je ressemble à d’autres aux yeux bleus, le bleu de mes yeux est unique. Quand je rencontre des gens, je leur dis d’emblée que je suis autiste. 

Ainsi, si je vis de l’anxiété ou si je suis confrontée à ce que mon autisme me fait vivre, je serai prête et les autres aussi ! Tout le monde saura comment réagir. Personne ne me traitera de pas fiable, de paresseuse, d’original ou de snob.

 

Les obstacles

J’ai plusieurs limitations qui ne se voient pas et pourtant, elles sont bien là ! Je sais que d’autres personnes autistes me ressemblent dans nos différences. Je plains ceux et celles d’entre elles qui n’affirment pas leur autisme, car ils et elles ne se rendent pas service.

 

Je le dis haut et fort puisqu’un ami à moi, qui ne parlait jamais de sa condition aux autres, s’est « tapé » tout un meltdown, il n’y a pas si longtemps que cela. Personne n’a bien réagi, parce que personne ne savait comment réagir. Le meltdown s’est étendu dans le temps et a été très souffrant.

 

Si nous sommes de plus en plus à parler de notre autisme, ce n’est pas pour faire comme les autres ou être « in » ! Si nous sensibilisons les esprits à l’autisme, c’est pour éviter que nous nous fassions dévisager quand on l’annonce. Si nous en parlons beaucoup, c’est pour faire tomber les préjugés et les barrières entre les atypiques et nous, les neurotypiques.

 

Bref

Si nous nous exprimons comme je le fais ici, c’est pour que les gens ne voient plus l’autisme comme si tous ceux qui ont cette condition viennent d’une autre planète.   Car peu importe qui nous sommes, on vient tous d’ici même si le « ici » des uns n’est pas identique au « ici » des autres.