Un parcours parsemé d’embûches

Par Josée Durocher

Aujourd’hui, j’ai reçu, dans la boîte de réception de courrier, un message de Mel, une femme autiste qui ne l’a pas eu facile. Je me doute bien qu’elle vit des situations particulières relativement à la crise sanitaire actuelle, mais Mel choisit plutôt de me raconter son histoire de vie.

J’ai décidé de donner la parole aux gens qui vivent avec l’autisme ou qui connaissent des personnes autistes. Je décide aujourd’hui de laisser Mel nous parler de son parcours qui, ma foi, est semé d’embûches et qui dénote souvent la difficulté d’être diagnostiqué adéquatement.

Rappelons-nous que les femmes autistes passent souvent dans l’ombre, dans un silence sourd, des spécialistes en autisme. L’invisibilité est donc un lot qui, heureusement, tend à disparaître avec les données sans cesse renouvelées au sujet de l’autisme féminin.

Depuis l’enfance

« Depuis mon enfance, je sais que j’ai une différence, mais personne ne m’a dit ce qu’était mon problème. À quatre ans, j’ai dû être séparée de ma famille pour aller séjourner dans un centre pour enfants handicapés. Les spécialistes ont dit que j’avais un retard de développement. »

Je suis de tout cœur avec Mel et je compatis vraiment qu’elle n’ait pas été diagnostiquée en bas âge concernant sa condition. Elle renchérit en m’expliquant : « Mes parents avaient jugé bon de me faire une petite sœur. Malgré cela, j’ai été séparée de ma famille. Personne ne semblait savoir ce qui était à l’origine de ce qui me handicapait. J’ai été ballottée entre les écoles du régulier et les centres de jour médicalisés une bonne partie de ma vie jusqu’à l’âge de vingt ans », m’explique-t-elle.

Ce ne doit pas avoir été facile de vivre tous ces bouleversements, ces changements de situations. Sachant qu’un enfant a besoin de stabilité, je suis bouleversée par l’histoire de Mel qui, avouons-le, ne l’a pas eu facile!

Une nouvelle évaluation

« J’ai alors demandé d’être évaluée à nouveau pour savoir si je pouvais travailler dans les milieux adaptés pour les personnes handicapées. Il semble que plusieurs de mes caractéristiques me bloquaient dans mon intégration au travail de l’époque. En fait, aucun de mes rapports de diagnostic ne font mention du mot « autisme » », me dit Mel qui semble avoir un moral à toute épreuve. Mais à la lire, je dénote également qu’elle a peut-être vécu une certaine forme de découragement qui s’explique par le fait de chercher et chercher, et ne jamais vraiment trouver.

Un diagnostic… enfin!

« J’ai ignoré que j’étais autiste, jusqu’à l’âge de 42 ans. Je croyais, que les autistes étaient aphasiques, passaient leur temps à baver et à battre des mains toute la journée. J’avais pourtant passé une bonne partie de mon parcours scolaire à fréquenter des autistes », me dit-elle enfin. Et je ne suis pas surprise des préjugés qu’elle pouvait entretenir. Moi-même, avant mon diagnostic, j’en nourrissais aussi!

« Il y a beaucoup de désinformation en ce qui entoure l’image de l’autisme. Ce qui a fini par m’attirer vers ce sujet, c’est qu’en deux mille dix-sept, j’ai vécu ce que mon médecin de famille avait appelé un dérèglement labyrinthique sans cause physique apparente.

Je n’ai jamais eu mal à la tête et je n’ai pas de nausées comme dans les cas classiques. Il m’a quand même prescrit des exercices plus un médicament contre l’anxiété. Étrange! J’ai cherché dans différents groupes de soutien sans savoir où frapper… »

Là non plus je ne suis pas surprise. Trouver quand on ne sait pas exactement où chercher n’est pas une chose évidente à faire… ni à vivre!

« Ma mère avait fini par se renseigner sur l’autisme parce que mon frère et sa fille avaient eu leur diagnostic d’autisme récemment, ainsi que les deux enfants d’une de mes sœurs. Elle m’a expliqué que mon retard de développement n’en était pas un.

Mes comportements étaient dus à l’autisme comme les problèmes sociaux et comme mon incapacité à regarder mon interlocuteur dans les yeux. Elle en connaît plus sur l’autisme parce qu’elle s’est renseignée sur les différents troubles associés, comme l’hyperacousie par exemple. Aujourd’hui, ça va mieux, mais je n’ai jamais trouvé la cause de mes vertiges », conclut-elle.

Je suis heureuse d’avoir lu les mots de Mel. Cela me rappelle la chance que j’ai d’avoir trouvé le nom que portait ma condition. Cela me rappelle aussi que plusieurs d’entre nous recherchent longtemps les réponses à nos multiples questions.

Je remercie Mel pour sa grande générosité. Écrire n’est pas toujours facile, mais elle a réussi, j’en suis convaincue à joindre plusieurs personnes ayant vécu un parcours similaire ou étant à rechercher des réponses à leurs questions en ce moment même.

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