Un pilier en autisme a quitté
Par Josée Durocher
Il est parti. C’est le cœur anéanti que plusieurs personnes témoignent de leur rencontre incomparable avec le Dr Normand Giroux, co-fondateur de La Clinique Autisme et Asperger de Montréal. Il était mari, père, grand-père, collègue… il était psychologue, professeur, clinicien… mais il était surtout, et pour la plupart d’entre nous, un « dévoileur » de personnalité, un baume sur nos blessures profondes et souvent provenant aussi loin que l’enfance ainsi qu’un véritable phare qui éclairait soudain notre présent et nos lendemains.
Une sacré chance!
J’ai eu la très grande chance de le rencontrer deux fois. Deux fois mémorables. Il m’a été d’une aide certaine. D’abord, pour comprendre mon fils, ensuite pour me comprendre moi. Moi, qui ne pensais qu’aux autres et qui faisais passer tout le monde avant moi.
Pour la première fois de ma vie et grâce à lui, je ne faisais pas que me regarder, je me voyais. Il a permis que mon regard atteigne la personne unique que je suis malgré toutes mes couches de peines et de souffrances.
Avant, après!
Beaucoup ont dit qu’il y avait un « avant » et un « après » Dr Giroux. Je ne peux qu’être d’accord avec cette affirmation ! Avant lui, je pleurais chaque nuit en m’endormant, convaincue que j’étais trop différente pour avoir une place, même toute petite. Après lui, je prenais une place et pas n’importe laquelle. Oh, non ! Je prenais MA place. Même si je la trouvais inconfortable au commencement… elle a depuis, pris énormément d’expansion et je l’habite pleinement maintenant.
Ce qu’il laisse derrière lui
Normand Giroux est parti, mais nous a-t-il vraiment quitté ? À lire les très nombreux témoignages sur les internets, je constate que son legs va bien au-delà des mots. C’est qu’il a marqué le monde ce gentil monsieur !
L’héritage qu’il laisse derrière lui, et qui fera en sorte qu’il vivra encore bien longtemps en nous, est son grand professionnalisme, sa courtoisie, ses élans de validation et son sourire si rassurant. Ce regard profond qu’il posait sur tous ceux qui allaient le consulter, ses échanges affirmés avec certains autres psychologues ou psychiatres (j’en ai été témoin !) et sa façon de faire ressortir le plus beau chez les gens.
Notre rencontre!
Non, nous n’oublierons pas Normand Giroux… il a su, et de manière délectable, insuffler le mot « humanité » dans l’autisme. Quand il m’a communiqué en personne mon diagnostic, c’est sur un ton posé et calme qu’il m’a regardé droit dans les yeux pour parler de ma condition.
Sur le chemin du retour, ce jour-là… une promesse m’a pris le cœur : j’allais être moi-même, enfin. Pourquoi ? Pourquoi une acceptation de mes différences subitement ? Parce que l’homme qui me l’avait annoncé n’a pas été ébranlé en les nommant. Parce que j’avais enfin des réponses et un but atteint à une quête identitaire que je menais depuis trop longtemps.
Dès lors, j’ai décidé d’insuffler aux autres ce que le bon docteur m’avait lui-même insufflé : l’espoir. L’espoir que l’annonce de notre condition n’est pas une fin, mais un superbe début. En connaissant l’autisme, on trouve davantage d’outils pour le vivre. Et, le plus important du message de ce vieil homme si attachant : on peut le vivre en étant heureux.
Merci Normand Giroux !