Je n’en ai peut-être pas l’air, mais…

Par Josée Durocher

Je ne passe pas inaperçue. Non. Je suis grosse et bien que l’être est de moins en moins jugé, il n’en reste pas moins qu’on me remarque beaucoup. J’ai les cheveux bouclés et je porte des lunettes à la monture noire et imposante. Tout ça fait en sorte qu’on me voit arriver de loin ! Ah !

L’autisme invisible

Ce qu’on ne remarque pas en revanche c’est mon autisme. Non. Lui, il passe inaperçu aux yeux de ceux qui ne savent pas ou qui ne veulent rien savoir !

De la moiteur de mes mains aux nombreux tremblements intérieurs et extérieurs que je tente de contrôler en passant par ma gorge sèche, rien n’y paraît. On ne voit pas mon inconfort aux différents sons ambiants, à l’éclairage, à certains touchers de certaines personnes, aux odeurs de parfums ou de nourriture qui persistent toujours trop longtemps dans mes narines non plus.

Le handicap

Souvent, même si j’ai expliqué ma condition, on ne la reconnaît pas comme un handicap. Pourtant, il m’arrive très souvent de me sentir handicapée par l’environnement qui m’entoure. J’ai besoin de calme, d’une personne accompagnatrice, de temps pour me calmer, me déposer, me recentrer aussi. 

Nonobstant tout cela, souvent, on m’en veut parce que je dérange. On me prend en grippe parce que je suis différente.

Ça dérange

Je disais en début de texte qu’on ne me jugeait pas autant qu’avant sur mon poids… reste que la grosse fille frisée à lunettes et qui est autiste de surcroît, ça semble faire beaucoup trop pour certaines personnes à accepter !

En discussion, plus tôt aujourd’hui, avec une personne qui me demandait pourquoi je demandais certains accommodements aux gens de mon entourage, j’ai répondu :  S’il n’en tenait qu’à moi, je n’en demanderais pas, mais il m’est nécessaire de le faire parce que je veux bien fonctionner et être au top, être dans chaque situation comme j’ai le droit d’être, le désir d’être et oui, le mérite d’être.

Ça ne change pas grand-chose pour les gens de tamiser un peu plus l’éclairage ou mettre le son de la musique un peu moins élevé, mais pour moi ça fait des différences non négligeables pour mon mieux-être !

Un ami m’a rappelé l’autre jour que si j’avais un chien d’assistance, les gens n’oseraient pas s’offusquer de sa présence ou encore ne discuteraient pas sa présence. J’aurais un chien d’assistance, voilà tout ! Même chose si j’étais en fauteuil roulant, on ne me demanderait pas de monter ou descendre des escaliers. 

Prendre sa place

Je considère qu’il en est de même pour mon autisme. J’ose le dire haut et fort au risque de déranger juste en l’affirmant. Si nous étions plusieurs, d’une même voix, à nous exprimer sur le sujet, on se ferait entendre peut-être davantage, qui sait?

En attendant qu’on unisse véritablement nos voix, je me dis que ma différence et les demandes que j’ai la concernant n’enlèvent rien à personne. Au contraire ! Tout cela sert aussi à ouvrir les horizons sur ma réalité qui est en fait la réalité de beaucoup d’autres comme moi.

Je n’ai peut-être pas l’air autiste en ce sens que ce n’est pas écrit dans mon front, mais je le suis tout de même. Plusieurs, comme moi, sont dans la même situation et il importe que nous prenions notre place. Si on n’enlève rien à personne en se donnant la chance d’être bien, il n’y a rien de mal là-dedans ! Si on prend notre place, on ne prend que notre place, ni plus ni moins, c’est tout !