Autisme et enfer au bureau ? 

Par Josée Durocher

Il y a quelques jours de cela, j’ai diffusé le texte « La pire expérience professionnelle de ma vie » et plusieurs d’entre vous étaient concernés par mes propos. Je suis consciente que ma souffrance de l’époque peut faire écho à ce que vous avez déjà ressenti ou à ce que vous ressentez actuellement dans votre vie professionnelle.

 

Heureusement, il n’y a pas que des histoires tristes… reste qu’il y en a eu beaucoup dans mon cas avant que je ne sache que je suis autiste. Ainsi, je prends mon courage à deux mains pour vous raconter un autre genre d’enfer que j’ai vécu, afin de dénoncer les comportements qu’on a eus à mon égard.

 

Tout le monde est à risque de vivre ça

J’en profite pour vous dire qu’il n’est pas nécessaire d’être autiste pour vivre ce genre d’enfer… suffit de ne pas savoir comment se défendre devant des gens mal intentionnés ! Reste, qu’à apprendre comment mettre nos limites, on apprend à se faire respecter. Nul besoin de faire comme moi j’ai fait à ce moment et tomber malade comment dans MALADE.

 

J’avais suivi des cours et des ateliers dans une école qui était de plus en plus renommée. Et bien que j’avais trouvé le fait de suivre ces cours et ces ateliers difficiles sur les plans moral et émotif, financier et psychologique, j’étais très fière d’avoir obtenu mon diplôme et j’avais fait ancrage en moi de cette fierté non dissimulée.

 

Un nouveau job

Un jour, l’école, à court de personnel, m’engagea pour combler un poste-clé dans l’entreprise. Dès la première journée de travail, ma patronne « péta » une crise de nerfs pas ordinaire parce que j’ai commis une petite erreur pas si grave que cela. Une erreur de débutante quoi ! 

 

Je n’en ai pas fait de cas de cette colère incommensurable et j’ai poursuivi ma journée pour me faire féliciter par cette même personne à la fin de ladite journée parce que j’avais su garder mon calme lors de sa crise de bassinette.

 

Le premier mois s’est poursuivi sans embûche… On me complimentait tous les jours… j’étais, selon les dire de la patronne, comme un cadeau tombé du ciel ! Pas vraiment dupe, j’étais sur mes gardes. Comment peut-on aimer quelqu’un si fort et si vite ? Je demeurais prudente.

 

Insidieusement

La violence dont j’ai été victime s’est installée insidieusement. D’abord, à microdoses, ensuite plus massivement, on ne m’insultait même pas à mots couverts et on me dénigrait devant les autres et même devant certains étudiants.

 

J’étais trop grosse, méchante, mal alimentée, intoxiquée parce que je prenais des médicaments… Je n’étais pas assez intelligente, mal éduquée, niaise et je n’avais pas de discernement.

 

Un jour, la patronne m’a même prise à part pour me dire que je n’avais pas de finesse dans mes propos. Le hic est que lorsqu’elle me disait de faire un message à quelqu’un dans l’entreprise, je passais le message qu’on me disait de passer ou que j’avais pris en note. Je n’étais pas responsable du contenu et c’est pour cette raison qu’elle m’en voulait. Je n’étais donc pas fine… méchante.

 

Je m’habillais mal, j’étais mal coiffée et ô grands Dieux, je n’avais pas été à l’école très longtemps, car je ne savais pas écrire !!! ??? !!!

 

Un corps qui s’obstine

Un matin, j’ai voulu descendre du lit et ma jambe gauche ne fonctionnait plus. J’avais beau dire, j’avais beau faire, j’étais incapable de marcher !

 

J’ai passé tous les tests imaginables jusqu’au jour où, sans avoir de résultat pertinents, mon médecin me demanda tout bonnement comment j’allais et j’ai éclaté en sanglots. Je n’allais décidément pas bien du tout.

 

Il n’en fut pas plus pour que je lui raconte tout ce que j’avais endurer et tout ce que j’avais « acheté » comme fausses croyances à mon sujet. L’estime de soi complètement à terre et l’amour de soi à zéro, j’ai passé six mois de ma vie sans pouvoir marcher, à me terrer dans le noir à boire du café.

 

Une thérapie

Vous dire les idées noires que j’avais ! Je considère encore miraculeux le fait que je sois vivante ! Finalement, c’est une connaissance qui était thérapeute qui m’a aidé à me sortir du trou en acceptant de faire des séances téléphoniques pendant un certain temps.

 

La douleur, parce que j’avais excessivement mal à ma jambe gauche, est tranquillement disparue et mon moral a remonté. J’ai dû réapprendre à me voir telle que je suis réellement, à m’accepter, à m’aimer à nouveau aussi.

 

On peut s’en sortir

C’est vrai qu’on peut se sortir d’à peu près n’importe quoi dans la vie. Chaque épreuve vient avec une résolution dont on ne s’attend pas, mais il y a des moments plus difficiles à vivre et celui-là était l’un d’eux.

 

Je suis toujours restée muette sur cette école et cette patronne parce qu’au fond de moi je connais trop bien cette personne et je la sais capable de beaucoup de méchanceté. Aujourd’hui, j’en parle. Pourquoi ? Parce qu’en restant muette je ne dénonce pas. 

 

Nul besoin pour vous de savoir de qui il s’agit. Elle, elle se reconnaîtra, bien sûr. Mais l’important, je pense, est que vous sachiez qu’il ne faut surtout pas endurer ce genre de comportements, car en ne disant mot, on consent.

 

Ce que je veux passer comme message est que peut importe qui nous sommes, autistes ou non, gros, grands, maigres, et j’en passe, peu importe nos différences, personne n’a le droit de nous traiter ainsi.  Je le répète:  « Personne, n’a le droit de nous traiter ainsi! »

 

Est-ce que l’autisme a joué un rôle ici ? Oui, fort probablement. On m’a très mal cernée et très mal comprise. Est-ce que cela aurait fait une différence de me savoir autiste ? Je ne pense pas. La méchanceté n’a qu’une seule et même couleur, elle !